Qualité environnementale du tertiaire privé : le point sur les obligations et les démarches volontaires (Partie 1)

13/02/2022

De nombreux cadres environnementaux s’appliquent aux bâtiments tertiaires, obligatoires (lois, décrets) ou volontaires (certifications et labels). Ils visent à limiter l’impact d’un bâtiment sur les critères énergie et carbone, prépondérants dans la lutte contre le changement climatique, mais également sur des critères écologiques et sanitaires connexes tels que la biodiversité ou la qualité de l’air intérieur.

LE DÉCRET TERTIAIRE : POUR UN PARC RENOVE PLUS SOBRE

Même si on ne le présente plus, impossible d’étudier les réglementations environnementales sans évoquer le Décret Tertiaire.
Initié par la loi Grenelle II en juillet 2010 puis au travers de la loi ELAN (Evolution du Logement, de l’Aménagement et du Numérique) en 2018, le Décret Tertiaire prévoit une obligation de travaux pour les propriétaires de bâtiments à usage tertiaire dont la surface est supérieure à 1000m². Il peut être considéré comme une réglementation environnementale puisque ces travaux doivent permettre de réduire la consommation d’énergie finale par rapport à une consommation de référence en fonction de plusieurs échéances :

  • 40% d’ici à 2030
  • 50% d’ici à 2040
  • 60% d’ici à 2050

Ensuite, les entreprises concernées devront renseigner leurs données énergétiques sur une plateforme appelée OPERAT (Observatoire de la Performance Energétique de la Rénovation et des Actions du tertiaire), développée par l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie).

C’est dans ce cadre qu’est apparue la réglementation Éco Énergie Tertiaire. Celle-ci s’adresse aux acteurs du tertiaire afin qu’ils tendent vers une sobriété énergétique de leurs bâtiments. Elle prend en compte non seulement la rénovation énergétique, mais également la qualité et l’exploitation des systèmes et équipements ainsi que le comportement des usagers.

Lorsque les propriétaires renseigneront leurs consommations sur la plateforme OPERAT, cette dernière leur fournira une attestation annuelle spécifiant les consommations du ou des bâtiments, en fonction des variations climatiques propres à leur situation et leurs objectifs.

Image1-Feb-15-2022-11-35-32-74-AMAvec cette attestation, une notation Eco Energie Tertiaire leur sera attribuée, visant à évaluer l’avancée des propriétaires dans leur démarche de réduction de la consommation énergétique. Cette notation s’échelonne du niveau insatisfaisant (feuille grise) vers le niveau excellent (trois feuilles vertes).

Le Décret Tertiaire encourage les maîtres d’ouvrage à mettre en place un Système de Management de l’Energie (SME) pour répondre au mieux aux enjeux réglementaires. Pour cela, il est nécessaire de réaliser un audit énergétique afin d’analyser la performance énergétique du site. Il est alors possible de faire un parallèle entre le Décret Tertiaire et la méthodologie de l’ISO 50 001. Dans les deux cas, la logique est la même :

  • la définition d’un périmètre et d’objectifs à atteindre chiffrés à partir d’une consommation finale de référence (Plan) ;
  • la définition d’un plan d’actions (Do) ;
  • la mise en place d’un processus de mesure des résultats avec des suivis d’indicateurs (Check) ;
  • la mise en place d’actions correctives dans le temps, si besoin, en vue d’atteindre ces objectifs (Act).

Si vous êtes concernés par le Décret Tertiaire, n’hésitez pas à consulter nos derniers articles sur le sujet :

Le guide des labels Energie et Carbone

LA RE2020 : DE NOUVELLES CONSTRUCTIONS DECARBONEES ET RESILIENTES

A partir de 2022, la Réglementation Environnementale 2022 (RE2022) deviendra le texte de référence en matière de performance environnementale du parc immobilier français. Venant remplacer la Réglementation Thermique 2012, la RE2020 s’appliquera aux bâtiments neufs tertiaires dès le 1er juillet 2022 (1er janvier 2022 pour les logements).

Elle s’inscrit complètement dans l’ambition du pays d’atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Les précédentes réglementations se sont toujours intéressées à la performance énergétique et thermique. La RE2020 intègre le critère carbone qui n’était, jusqu’ici, pas abordé. Néanmoins, cette démarche avait été initiée dès 2016, avec l’expérimentation E+C- qui venait préfigurer la RE2020. Les retours d’expérience de cette expérimentation ont permis de définir les exigences réglementaires pouvant être appliquées du point de vue technique et financier.

Il est possible de distinguer différents enjeux liés à cette réglementation :

  1. Faire en sorte que l’impact carbone des bâtiments neufs soit réduit notamment par l’utilisation de matériaux biosourcés et/ou recyclés.
  2. Améliorer encore et toujours la performance énergétique et la consommation des bâtiments neufs grâce à des exigences renforcées sur le besoin bioclimatique et à la prise en compte de nouveaux postes de consommation.
  3. Garantir que les bâtiments tertiaires soient adaptés aux conditions et changements climatiques futurs avec la prise en compte de la notion de confort d’été.

La RE2020 considère le poids carbone des bâtiments sur toute sa durée de vie : conception, réalisation/construction, exploitation et démolition. Alors qu’aujourd’hui, la construction d’un bâtiment neuf représente 60% de son empreinte carbone totale, l’ambition est de réduire ce chiffre à 30% d’ici 10 ans. Dans cette logique, cette nouvelle réglementation nécessitera le calcul RT mais également la réalisation d’une ACV (Analyse en cycle de vie) dans laquelle le carbone constitue un nouvel élément d’arbitrage.

LA LOI ANTI-GASPILLAGE POUR UNE ÉCONOMIE CIRCULAIRE (AGEC)

La loi anti-gaspillage pour une économie circulaire, datant du 10 février 2020, vise à transformer les modèles de production et de consommation actuels. Le secteur du bâtiment est directement concerné avec 46 millions de tonnes de déchets par an produits. Même si certains déchets sont déjà revalorisés tels que le bois ou le métal, ce n’est pas encore le cas de tous, notamment les déchets du second œuvre (plâtre, isolants, fenêtres, plastiques, etc.). L’objectif pour les acteurs du bâtiment est de revaloriser davantage leurs déchets et de limiter au maximum les dépôts sauvages.

Dans ce cadre, la création d’une filière REP (Responsabilité Elargie des Producteurs) pour les produits et matériaux de construction du bâtiment est prévue dès 2022. Elle imposera aux fabricants de matériaux le paiement d’une nouvelle écocontribution. Celle-ci vise à financer la reprise gratuite des déchets triés, le ramassage et le traitement des dépôts sauvages de déchets, le développement de filières de recyclage et le renforcement du maillage territorial des points de collecte. Elle est directement inspirée de la démarche « pollueur-payeur ». Un projet de décret concernant la création de cette filière a été soumis en juillet dernier, approuvé notamment par le Conseil Supérieur de la Construction et de l’Efficacité Energétique (CSCEE).

Dès janvier 2022, une autre mesure issue de la loi AGEC entrera en vigueur : l’obligation de « diagnostic PMD » (Produits, Matériaux et Déchets). Cette mesure recalibre le diagnostic déchets déjà existant pour les démolitions, dans une optique d’économie circulaire et l’étend aux rénovations significatives.

Le Décret Tertiaire, la RE2020 ou encore la loi AGEC font partie des grandes réglementations actuelles qui régissent les principales exigences en matière de construction et rénovation. Toutefois, il est incomplet d’aborder seulement ces lois lorsque l’on parle de qualité environnementale du tertiaire privé. Il ne faut pas négliger l’importance des certifications et des labels qui traitent de thématiques plus spécifiques, évoqués dans la partie 2 de cet article.

 

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