Transition écologique en France : le rapport du Haut Conseil pour le Climat dévoile les priorités pour 2030

3/08/2023

Le rapport 2023 du Haut Conseil pour le Climat (HCC) met en lumière les avancées et les défis rencontrés par la France dans sa lutte contre le changement climatique. Bien que les émissions de gaz à effet de serre (GES) aient continué à diminuer en 2022, elles ne progressent pas assez rapidement pour atteindre les objectifs climatiques de 2030. Le HCC met en évidence le dépassement du "deuxième budget carbone" sur la période 2019-2022, principalement en raison d'une faible absorption par les puits de carbone. Malgré les efforts déployés dans divers secteurs émetteurs, des blocages persistent, compromettant ainsi la décarbonation attendue. Face à cette situation, le HCC formule des recommandations pour accélérer la transition écologique. Dans cet article, ALTEREA décrypte pour vous quelques préconisations touchant le secteur du bâtiment.

Les secteurs du bâtiment et de l'industrie : de bons élèves

Selon les données du Centre interprofessionnel technique d'études de la pollution atmosphérique (Citepa), en 2022, le secteur du bâtiment a émis 70,1 millions de tonnes équivalent CO2, en baisse par rapport aux 74,1 millions de tonnes enregistrées en 2021.

D'un autre côté, en 2022, les transports ont produit 130,5 millions de tonnes équivalent CO2, en augmentation par rapport aux 127,6 millions de tonnes en 2021. De même, l'industrie a légèrement réduit ses émissions de 77,8 à 73,7 millions de tonnes équivalent CO2, tandis que le secteur de l'énergie a vu ses émissions augmenter de 42,2 à 46,6 millions de tonnes équivalent CO2.

Face à cette situation, le HCC incite à la prise de mesures « correctrices rapides et en profondeur » afin de réaliser les transformations structurelles nécessaires pour accélérer la transition écologique. Pour y parvenir, il est essentiel que la France mette en œuvre de manière systématique toutes les composantes de son plan d'action climatique. Cela implique une transformation de la politique économique dans son ensemble, y compris les aspects budgétaires, fiscaux, commerciaux, industriels et de l'emploi. De plus, mobiliser les ressources et les financements nécessaires tout en soutenant les plus vulnérables dans une démarche de transition juste est primordial pour éviter la maladaptation.

Rénovations globales performantes : une feuille de route pluriannuelle nécessaire

Pour accélérer la transition écologique dans le secteur du bâtiment, le rapport du HCC formule des recommandations clés, notamment la mise en place d'une feuille de route pluriannuelle pour la rénovation.

La première mesure préconisée est la massification des rénovations globales performantes. Cette approche coordonnée vise à traiter l'ensemble des aspects énergétiques d'un bâtiment, ce qui permet une réduction significative de la consommation d'énergie et des émissions de GES. Pour mettre en œuvre cette stratégie, une feuille de route pluriannuelle des financements et de leurs conditions d'éligibilité doit être élaborée. De même, un indicateur spécifique doté d'objectifs clairs, d'un suivi régulier et de moyens de contrôle sera mis en place pour évaluer l'efficacité des actions entreprises.

Dans le même temps, les dispositifs tels que MaPrimeRénov' doivent être révisés pour assurer leur cohérence, leur unification et être conditionnés à une exigence de résultats. Il est proposé de fixer une trajectoire de hausse du soutien public aux rénovations globales avec des étapes intermédiaires pour garantir un progrès constant.

L'évaluation annuelle de l'efficacité des aides est une mesure cruciale pour évaluer la réduction réelle de la consommation d'énergie et des émissions de GES. Cette évaluation permettra d'ajuster les dispositifs en fonction des résultats obtenus et d'optimiser les ressources allouées à la transition énergétique.

Le rapport du HCC met également l'accent sur le renforcement de l'accompagnement des ménages précaires et la formation des professionnels. Ces deux aspects sont essentiels pour garantir que tous les citoyens bénéficient des actions de rénovation et pour assurer une mise en œuvre efficace des projets de transition énergétique.

En ce qui concerne la réglementation, le HCC préconise l'alignement et l'unification des réglementations thermiques avec la RE2020 pour les constructions neuves et existantes d'ici 2030. Cela garantira une cohérence dans les normes et une approche harmonisée dans la lutte contre le changement climatique. De plus, l'adaptation au changement climatique et la prise en compte des aléas climatiques doivent être intégrées au label RE2020, afin de renforcer la résilience des bâtiments face aux défis climatiques futurs.

Les réseaux de chaleur et la décarbonation du secteur énergétique

Dans le secteur de l'énergie, le rapport met en évidence le potentiel des réseaux de chaleur, en soulignant que leur déploiement avec une part d'énergie renouvelable de 75% permettrait d'atteindre les objectifs fixés par la loi TECV (relative à la transition énergétique pour une croissance verte) d'ici 2030.

Au-delà de cette mesure, le HCC plaide pour une vision d'ensemble visant à réaliser une décarbonation complète du secteur énergétique. Cela nécessite une meilleure orientation des investissements pour accélérer la sortie des énergies fossiles et favoriser la production de chaleur décarbonée. Pour y parvenir, il est essentiel d'évaluer attentivement les technologies émergentes telles que l'hydrogène "vert" et la capture et le stockage du carbone. Ces solutions innovantes pourraient jouer un rôle clé dans la transition énergétique, mais leur viabilité doit être soigneusement étudiée.

Dans la continuité, le rapport encourage la poursuite du développement des énergies renouvelables (ENR) et la pérennisation des mesures de sobriété énergétique dites "structurelles". Les ENR, telles que l'éolien et le photovoltaïque, sont des atouts majeurs pour réduire notre dépendance aux combustibles fossiles et pour accroître la part d'énergie propre dans le mix énergétique.

En ce qui concerne le secteur du BTP, le HCC recommande la mise en place de mesures spécifiques pour les professionnels. Notamment, l'anticipation de la mise en place des Zones à Faibles Émissions de Mobilité (ZFEM) devrait se faire en déployant des modes de transports alternatifs et en installant des bornes de recharge électrique. De plus, le rapport encourage la régénération de davantage de petites lignes ferroviaires et vise l'électrification complète du réseau ferré ;des mesures qui contribueront à une mobilité plus durable.

La réindustrialisation de certaines filières liées aux énergies renouvelables et au chauffage bas carbone, comme les pompes à chaleur, les éoliennes et les panneaux photovoltaïques, est également préconisée par le HCC.

Enfin, le HCC appelle au maintien de la suppression de la niche fiscale sur le gazole non-routier hors agriculture, dès que les conséquences de la guerre en Ukraine sur les prix de l'énergie seront atténuées. Cette mesure vise à décourager l'utilisation de carburants polluants dans certains domaines d'activité. Parallèlement, le rapport recommande la création d'une taxe sur les HFC gaz hydrofluorocarbures (HFC) avec un montant incitatif pour encourager l'abandon de ces gaz à fort potentiel de réchauffement climatique.

Le rapport du Haut Conseil pour le Climat met en lumière les progrès accomplis par la France dans la réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais souligne également la nécessité d'accélérer la transition écologique pour atteindre les objectifs climatiques de 2030. Les recommandations du HCC pour la massification des rénovations globales performantes et la décarbonation du secteur énergétique sont essentielles pour relever ce défi. La France doit agir rapidement et mettre en place des politiques économiques et réglementaires ambitieuses pour créer un avenir plus durable et respectueux de l'environnement.

Découvrez le rapport complet du HCC : HCC_RA_2023 - 28.06 copie (vie-publique.fr)